ici&demain ǀ Newsletter #2
La peur du changement est souvent plus grande que le changement lui-même.
Bonjour à toutes et à tous,
Depuis sa publication, la CSRD et sa complexité a déjà fait couler beaucoup d’encre.
Nous nous intéressons aujourd’hui aux moyens de comprendre simplement la CSRD.
L’objectif : tirer tous les bénéfices du changement qu’apporte la nouvelle directive.
Au programme de cette deuxième édition :
🤔 La CSRD trop complexe pour faire avancer les sujets sociaux ? C’est ce que semble révéler l’enquête de Deloitte réalisée en partenariat avec l’ORSE et l’ANDH.
🏭 L’ESG, une affaire de bureaucratie ou un vrai levier de transformation ?
David Djaïz, essayiste et philosophe politique, invité au micro du podcast Vlan!, regrette que l’Europe, créatrice de taxes et normes ESG, n’apporte pas de dimension de désir à la durabilité. Notre réponse.
1. La CSRD, trop complexe pour faire avancer les sujets sociaux ?
La dernière étude de Deloitte, l’ORSE et l’ANDRH, “2024, cap sur la CSRD”, s’est intéressée à la maturité des entreprises sur le volet social de la CSRD.
Plus de 74 entreprises ont été interrogées, représentant plus de 2 millions de salariés issus de 15 secteurs d’activités différents. Et les chiffres parlent d’eux même :
34 % des entreprises répondantes ne savent pas si elles sont soumises à la CSRD.
24 % estiment avoir un niveau de compréhension élevé de la norme sociale et de ses exigences.
Le constat est clair : les entreprises françaises ne sont pas prêtes et ne comprennent pas les normes.
Pourtant, la culture du reporting est déjà bien ancrée auprès des fonctions RH.
En comparaison avec d’autres pays d’Europe, la France est en avance sur le reporting social : bilan social obligatoire, Document unique d’évaluation des risques professionnels, Index d’égalité professionnelle…
Mais voilà, la norme sociale de la CSRD élargit le reporting à plusieurs centaines de données. Le chantier pour collecter ces données est conséquent.
Cet élargissement des données explique-t-il à lui seul la difficulté pour les entreprises française à s’approprier la CSRD ?
Notre analyse : au-delà de l’effort de reporting, il y a un autre frein majeur.
→ Il réside dans le caractère sensible des informations à reporter.
Car l’entreprise doit désormais :
Reporter des informations qu’elle n’est souvent pas prête à partager : ses effectifs de travailleurs indépendants et d’intérimaires, par exemple.
Reporter des données encore confidentielles : les écarts de rémunération, les salaires décents, les faits de discrimination ou de violation des droits humains, etc.
En tant que consultants, nous avons la responsabilité de changer la donne.
👉 Faire preuve de pédagogie
La CSRD peut sembler intimidante. Chez ici&demain, nous avons pris l’engagement de déjargonner nos propos et d’expliquer clairement les termes de la CSRD. Parce que l’appropriation passe d’abord par la compréhension.
Ainsi, la norme sociale parle de “procédures de réparation des impacts négatifs et canaux permettant aux travailleurs de l’entreprise de faire part de leurs préoccupations”.
Il s’agit simplement du mécanisme d’alerte et de son suivi. Celui-ci doit remplir les critères prévus par le devoir de vigilance français, et deux conditions supplémentaires : être disponible, et avoir la confiance des effectifs.
👉 Illustrer concrètement les attentes de la CSRD
La lecture des normes questionne sur les actions concrètes à mener. Nous illustrons les normes avec les meilleures pratiques.
À titre d’exemple, le Groupe Michelin a défini le “salaire décent” comme une rémunération suffisante pour accéder à des conditions de vie décentes. Il doit permettre aux salariés et à leur famille de couvrir leurs besoins fondamentaux tels que l’alimentation, le logement, l’éducation de leurs enfants et les soins de santé. 98,5 % des salariés percevaient un salaire décent en 2022 et le groupe vise 100 % en 2030.
👉 Impulser le changement
Notre rôle est d’inspirer les équipes RH, RSE, et les organes de gouvernances. La CSRD doit être saisie comme un outil au service d’une stratégie de long terme.
Ainsi, nos travaux autour de la CSRD sont l’occasion de définir ou de réaffirmer une vision et une ambition partagée, de faire monter les équipes en compétences, et d’accompagner leur structuration pour faire de la CSRD une expérience réussie de transformation.
2. L’ESG, une affaire de bureaucratie ou un vrai levier de transformation ?
Invité de l’épisode #292 du podcast Vlan!, consacré aux enjeux de la géopolitique climatique, l’essayiste David Djaïz fait le lien entre la multiplication des normes environnementales en Europe et la montée de mouvements populistes et antiécologiques, quand d’autres pays comme la Chine et les États-Unis cherchent à faire de l’action climatique un outil de fierté nationale et d’innovation.
David Djaïz revient notamment sur la CSRD, qui transformerait l’ESG en bureaucratie, au détriment d’un vrai changement de modèle d’affaires des entreprises.
Mais l’un peut-il se faire sans l’autre ? La CSRD est-elle un frein ou un levier à la transformation ?
Cela fait plus de deux ans que nous accompagnons les entreprises à anticiper la CSRD. Sur le terrain, à leurs côtés, nous refusons la conformité pour la conformité.
Au contraire, nous utilisons les exigences de la CSRD pour travailler en profondeur leurs stratégies.
Nous faisons l’expérience que la CSRD est un puissant levier de transformation. Voici pourquoi.
La double matérialité est un instrument de transformation des modèles d’affaires.
Les entreprises que nous avons accompagnées ont toutes rehaussé la matérialité de leurs sujets. Trois sujets environnementaux progressent : la biodiversité, l’eau, les microplastiques. Ces sujets sont enfin compris et reconnus comme : d’une part des sujets ayant un impact aussi irrémédiables que ceux sur le climat ; et d’autre part comme des sujets stratégiques pour la pérennité des modèles d’affaires à long terme. Nous publierons prochainement des études sur ces sujets essentiels, encore trop oubliés dans les analyses de matérialité.La CSRD offre une nouvelle vision stratégique.
Sur toute la chaîne de valeur, l'entreprise est invitée à investiguer les signaux faibles, les sujets sensibles, ou les points de doute. Avec les entreprises, nous posons les questions de manière très concrètes. Par exemple : la continuité d’activité des usines est-elle menacée de stress hydrique sur leurs territoires ? La pérennité du modèle d’affaires fortement consommateur de plastique est-elle menacée dans un monde sans hydrocarbure ? Un client présente des cas avérés de violation de droits humains : est-ce un sujet pour l’entreprise ?
La CSRD est l’opportunité d’associer la gouvernance et les équipes opérationnelles à un projet stratégique partagé. Elle est un levier d’innovation et une chance pour la compétitivité de l’Europe, qui prend une longueur d’avance par rapport à ses concurrents internationaux qui seront tôt ou tard confrontés aux enjeux de durabilité.
En coulisse
🎙️Vous l’attendiez avec impatience ? Le prochain épisode de CSRD Stories sera bientôt disponible sur notre chaîne Youtube et toutes vos plateformes d’écoute. Stay tuned !
Durablement vôtre,
Pauline Roulleau, Elsa Boniface et toute l’équipe de ici&demain.